Durant l’année 1972-73, le programme commun de gouvernement adopté par les trois principales formations de gauche est débattu à de nombreuses reprises lors de réunions internes de l’UNEF. Avant même la rentrée universitaire, le projet de résolution du collectif national des 23 et 24 septembre « constate avec satisfaction la convergence qui existe entre les revendications des étudiants et les solutions que préconise l’UNEF, et les mesures contenues dans le programme commun de gouvernement […] » qui vient juste d’être signé au début de l’été.

Au début de l’année 1973, la proximité des législatives a poussé l’UNEF a se positionner avec davantage de clarté en passant du « constat » au « soutien ».

Lors de son collectif national des 13 et 14 janvier, un appel, adopté à l’unanimité, informe les étudiants de France que l’organisation syndicale a décidé de « soutenir le programme commun ». Le secrétaire général de l’époque, René Maurice, dans une lettre dont nous ignorons le destinataire présente un « plan de travail » visant à mobiliser les étudiants pour participer à la victoire électorale des candidats des partis signataires de cet accord pour les législatives de mars 1973.

 

Chronologie :

1972, 26 juin : Signature du Programme commun de gouvernement entre le Parti communiste et le Parti socialiste rejoints par les radicaux de gauche quelques jours plus tard.

1972, 23 et 24 septembre : Collectif national de l’UNEF

1973, 13 et 14 janvier : Collectif national de l’UNEF

1973, 9, 10 et 11 février : 6e congrès de la FRUF Orsay

1973, 17 février : Conférence nationale des Elus le 17 février 1973 à la Sorbonne.

1973, 4 et 11 mars : élections législatives.

17 février 1973 : Conférence nationale des Elus de l'UNEF - Grand amphi de la Sorbonne - Photo d'Alain Miranda

« L’UNEF APPELLE LES ETUDIANTS A VOTER, FAIRE VOTER POUR LES CANDIDATS DU PROGRAMME COMMUN ! »

Extrait du texte de résolution adopté lors du CN des 13 et 14 janvier 1973

Cette prise de position clairement politique et cette participation à la campagne électorale ont dû provoquer des débats au sein de l’organisation. Ainsi, la résolution débattue lors du CN de janvier prend la précaution de rappeler la nature syndicale de l’organisation (« Notre analyse n’a pour point de départ, ni doctrine, ni théorie préétablie ») et sa volonté de rassembler tous les étudiants « quelles que soient leurs opinions politiques, philosophiques ou religieuses sans que personne ne leur demande ni de les abandonner, ni de les taire ». 

La conférence nationale des élus organisée à la Sorbonne le 17 février soit moins d’un mois avant les élections adoptera un nouvel appel annonçant que le « triomphe de la Gauche [les 4 et 11 mars], c’est l’avènement de l’Université démocratique, dans une France démocratique où, oui, il fera bon vivre ! ». Un numéro « spécial programme commun » du mensuel de l’UNEF, « Etudiants de France » sera édité et diffusé puisque le « contenu du programme commun reprend l’essentiel des solutions que nous proposons. » 

Cette mobilisation n’empêchera pas la victoire de la majorité de droite au soir du second tour. Néanmoins, l’UNEF sera à nouveau présente dans le champ politique l’année suivante en appelant à voter pour François Mitterrand, candidat unique des forces de gauche signataires du programme commun pour les présidentielles.

Cet activisme électoral de l’UNEF sera donc encore présent en 1974. Il semble cependant que cela ne soit plus – ou beaucoup moins – le cas par la suite. Des appels à voter ont été faits, la plupart du temps pour des seconds tours, mais sans cet investissement de l’organisation perceptible en 1973.

Guillaume Hoibian

PS : Lors de son 6e congrès tenu en février de la même année, la FRUF apparaît moins mobilisée et impliquée que l’UNEF. Certes, la fédération affirme que « la victoire de ce programme […] serait pour le succès de nos revendications un des pas les plus importants jamais accomplis. » (Extrait du texte d’orientation). Mais on ne trouve pas de traces d’une mobilisation électorale de la FRUF auprès des résidents. La présidente sortante, Marie-George Buffet, page 11 de son rapport d’activité, se contente de signaler l’existence du Programme commun dans un chapitre consacrée à la « riposte des travailleurs » et de noter « l’écho favorable rencontré chez les étudiants [pour] le soutien de l’UNEF au PCG » dans le chapitre suivant. Le contraste avec les messages adressés à ce congrès par le SNES, le SneSup et l’UNEF, chacun contenant un appel à voter, est très net. Cela peut s’expliquer par une plus grande diversité politique des délégués de la FRUF (Les lambertistes ne fonderont la FERUF qu’en 1975), et peut-être pour certains une moins grande politisation. A creuser !

Lettre de René Maurice datant du 17 janvier 1973 suivie du texte de résolution et de l’appel adoptés lors du CN des 13 et 14 janvier 1973

Étudiants de France, numéro 7 de février 1973

Appel de la conférence nationale des élus du 17 février 1973

Bulletin intérieur de la FRUF, numéro spécial 6ème congrès (9-11 février 1973 – Orsay)